Les Sœurs à l’œuvre
Ayant appris que je rôdais dans les parages, le CFPE (Centre Français pour la Protection de l’Enfance) a pris l’excellente initiative de me contacter pour passer voir l’un de leurs partenaires locaux et y faire quelques vidéos.
Le CFPE, c’est donc une asso française dont l’un des moyens d’actions est le parrainage. Les parrains sont de braves gaulois qui, au lieu de confier leurs deniers à Jérôme Kerviel, préfèrent aider un enfant dans ce coin-ci du globe, ou un autre, force étant de constater que ce ne sont pas les enfants en difficulté qui manquent. Comme votre serviteur avait 1. adhéré au projet, 2. du temps, 3. des chevilles grosses comme ça à l’idée qu’on le contacte via son modeste blog, je me suis retrouvé à rendre visite à l’Œuvre & Collège de la Jeune Fille des Sœurs Missionnaires du Très Saint Sacrement.
C’est un bâtiment bas et gris comme tant d’autres écoles. Une partie des 2 500 enfants, de toute confession, s’ébrouent dans la cour tandis que l’on traverse le parking couvert de ces vieux bus scolaires américains. Dans ces murs, les élèves de 3 à 17 ans y étudient en arabe et en français. Certains ne sortent guère de l’établissement, et demeurent à l’internat. Quelques-uns sont orphelins.
Rana est Assistante de Direction, et, si vous connaissez ce métier, ça veut dire que vous pouvez être amené à faire tout et n’importe quoi. Aujourd’hui, elle s’improvise guide, mais en général, elle est plutôt assistante sociale. Depuis 1973, le rôle de l’établissement ne s’arrête pas quand la cloche a sonné, et il fait œuvre de solidarité dans la vie locale. Si les voitures de luxes se multiplient à Beyrouth, Rana ne cache pas qu’ici chaque année ici un peu plus de familles plongent dans la détresse. Rana est enceinte d’une petite Rita pour janvier, mais d’ici là elle se dépense sans compter.
Des gamins joyeux jouent et crient dans les préaux tandis que nous faisons le tour du bâtiment. Font coucou à la caméra. Ce qui frappe, ce sont les différences d’âge. De la crèche au bac, tous se retrouvent dans la même enceinte. Un peu plus tard, quand le bus scolaire nous redescendra à Jebel (Byblos), ce même amoncellement pèle-mêle d’enfants me prendront à parti joyeusement dans un français plus ou moins impeccable, selon leur âge. “Tu viens d’où ?” “Tu aimes le Liban ?” “Tu es marié ?”. Au cours de la conversation, on sourit à la pensée qu’ils ont sans doute un langage plus soutenu que bien des mômes du même âge en hexagone.
C’est la récré pour les lycéens. Rana introduit Mia, Rita et Antonella dans la salle d’accueil. Les deux premières ont 17 ans et sont parrainées par le biais du CFPE. Mia l’est depuis l’âge de 10 ans, et elle veut étudier la médecine l’an prochain, à l’Université Libanaise. Rita rêve elle de devenir analyste en biologie, peut-être travailler pour la police scientifique. Sans le programme de parrainage, elles n’auraient sans doute pas eu les moyens d’être scolarisées.
Plus de 160 de leurs camarades sont ainsi soutenus. Le parrainage institue une relation directe entre l’enfant et le parrain, relation épistolaire à minima, mais qui donne parfois lieu à des visites au Liban. Les filles confient à quel point il est difficile de débuter un dialogue avec un inconnu, de parler de choses privées avec quelqu’un d’aussi lointain. Mais après plusieurs années d’échanges avec Marie-Madeleine, Rita veut garder contact, voir un jour la rencontrer. Un souhait récurrent chez ces filleuls.
Antonella a 14 ans, et elle est nettement plus réservée. Elle porte les stigmates d’un grave incendie qui l’a laissé orpheline de sa mère, et subit depuis de coûteuses opérations. Rana se fait un sang d’encre pour elle, qui a tendance à se renfermer sur elle-même. Un dossier a été déposé auprès du CFPE.
Elle est en attente d’un parrain.
[un grand merci à Coline, Anne-Valérie, Vincent et Caroline]
[Edit du 22/10: vidéo des lieux]
C’est bien ! et c’est rigolo cette façon que tu as de passer du frivole au sérieux, du coq à l’âne, de la cocotte à l’ânesse !!
et vice versa….